Hermouet, l'autonomie pour fil rouge
Depuis son rachat, le négoce vendéen a trouvé un second souffle tout en gardant un mode de fonctionnement basé sur une relation à l'agriculteur uniquement économique.
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Créée en 1950, l'entreprise vendéenne Hermouet connaît une expansion d'activité depuis sa reprise en juillet 2008 par Daniel Le Bail, son PDG à ce jour. Celui-ci était alors à la tête de la société Dipra, spécialisée dans la fabrication de mash pour bovins et la livraison de fuel. Les deux structures sont rattachées aujourd'hui à un holding financier auquel participent deux autres associés qui sont basés principalement chez Dipra, mais proposent également leurs compétences au négoce. « En rachetant Hermouet, je souhaitais nous diversifier par rapport à notre activité en alimentation animale en retournant sur l'activité appro-collecte que Dipra avait à ses débuts », explique Daniel Le Bail. Hubert Menguy, venant tout juste de prendre sa retraite le 31 janvier, en était le directeur général depuis 2006. Une partie de sa mission est reprise par Daniel Le Bail qui jusque-là participait uniquement aux décisions d'investissement et de management.
Un positionnement particulier
Depuis son changement de main il y a plus de quatre ans, ce négoce a fait un bond en avant. De dix-huit salariés, il est monté à vingt-huit avec, entre autres, le recrutement d'un responsable logistique, d'une responsable appro, d'un responsable achat-vente céréales et du renforcement de l'équipe commerciale, passée d'un à quatre commerciaux. De 200 000 t de collecte, il a engrangé 365 000 t en 2011 et 390 000 à 400 000 t pour la récolte 2012. La collecte est le véritable coeur de son métier puisqu'elle participe pour 75 % au chiffre d'affaires. « Nous avons élargi quelque peu la zone d'activité et, surtout, nous avons renforcé notre présence là où nous étions », avance Daniel Le Bail, tout en précisant, « nous ne faisons pas de prospection. Les agriculteurs viennent à nous d'eux-mêmes, car nous répondons à leur recherche d'autonomie ». En effet, la société Hermouet a un positionnement particulier parmi la distribution agricole puisqu'elle fait de la mise en marché, en appro et collecte, pour une certaine typologie d'agriculteurs avec un minimum d'accompagnement et sur une large zone de chalandise.
Premier distributeur certifié en phytos
D'ailleurs, ce négoce a dû apporter la preuve de l'absence d'activité de conseil dans le cadre de la certification liée à la réforme de l'agrément phyto, afin de respecter les termes du guide de lecture du référentiel (publié sur le site web du ministère de l'Agriculture). Une note de service de la direction a été fournie à l'organisme certificateur Certis pour attester qu'aucun programme de préconisation ni de réunions et documents techniques ne sont proposés aux agriculteurs. La fiche de fonction des commerciaux précise qu'ils ne font que de la vente. Aucune indication n'est donnée en termes de doses ou de conseil cultural.
La société Hermouet est en fait le premier distributeur agricole à être certifié pour la distribution de produits phytos à des utilisateurs professionnels. Ce dossier a été pris en main en juin 2011 par Mickaël Murail, responsable logistique, engrais et réglementation et rôdé aux démarches qualité avec l'obtention du CSA-GTP, du 2BSvs et de la certification agriculture biologique. L'audit final s'est déroulé en juin 2012 et le certificat a été délivré le 4 septembre 2012. « J'ai travaillé ce dossier en interne seul, puis avec l'aide des documents proposés par le réseau Agridis dontnous sommes membres », détaille Mickaël Murail qui, au final, évalue cette démarche « pas si compliquée que cela à notre niveau, car quasiment toutes les exigences étaient déjà en application chez nous comme celle de ne pas rémunérer les commerciaux en fonction des ventes ». Etre affranchi de la partie « conseil » a bien allégé la tâche pour obtenir cette certification qui n'a rien changé en fait pour l'équipe terrain. Toutefois, pour anticiper toute stratégie qui pourrait intégrer dans l'avenir de la préconisation, faite sans doute de façon ponctuelle, l'entreprise a choisi le Certiphyto conseil pour le personnel concerné par ce certificat individuel.
Le mode de fonctionnement du négoce, perpétué avec la reprise, l'amène à s'adresser à une typologie d'exploitants qui sont de « vrais chefs d'entreprise, avec une offre d'achat importante, très autonomes et recherchant un minimum de conseils car ils sont rattachés à des Geda, des Ceta ou à des conseillers indépendants ». Ils apprécient la réactivité et la rigueur de l'entreprise qui « répond au jour le jour, avec beaucoup de communication par téléphone, des SMS, des mails. Un interlocuteur est toujours disponible pour donner une réponse immédiate », rajoute Hubert Menguy. Même si les clients sont en partie « des opportunistes, remarque Frédéric Raison, commercial, nombre d'entre eux travaillent avec nous depuis des années. Nous devons avoir un turnover de 10 % ».
Viser les 500 000 t de collecte
Le négoce vendéen mise sur la légèreté de sa structure pour être compétitif ainsi que le formule Mickaël Menguy, responsable achat-vente de la collecte : « Nous sommes vraiment des metteurs en marché avec des charges et des marges réduites : deux personnes pour gérer 365 000 t de céréales et d'oléagineux. Notre méthode de commercialisation intéresse nos clients, car elle est pratique, rapide, adaptée au marché. Ils peuvent vendre à n'importe quel moment et à des prix qui les intéressent, à un opérateur aux frais d'approche et de fonctionnement faibles. La plupart de nos clients connaissent bien les marchés et savent quand le prix est rentable pour eux. » Le principe de donner des cotations en temps réel indexées sur le Matif fait que les commerciaux n'interviennent pas sur l'achat de céréales. D'autres éléments qui séduisent les clients sont également soulignés : les délais de livraison en appro (12 heures en cas d'urgence), la justesse de facturation (gros travail de pointage) et des délais de paiement en céréales tenus avec rigueur avec des ventes toujours établies par contrat. L'indépendance qui semble caractériser la clientèle, se retrouve également dans le fonctionnement mis en place. En effet, les commerciaux, tout comme les chauffeurs, sont décentralisés en région : l'un couvre l'Ille-et-Vilaine, la Loire-Atlantique, le Maine-et-Loire et le nord de la Vendée, un second la zone autour du siège social, un troisième le sud de la Vendée et un quatrième la Charente et la Charente-Maritime.
En outre, Hermouet n'a en fait adhéré à un réseau de négociants, Agridis en l'occurrence, qu'à la fin de 2010. Son développement et la nécessité d'assurer la pérennisation de son activité l'ont poussé dans ce sens. Et pour maintenir un niveau de compétences adapté au marché, des sessions de formation sont régulièrement suivies, concernant notamment les marchés et les contrats de vente.
Les moyens mis en oeuvre depuis quatre ans devraient permettre, en grande partie, la croissance de l'entreprise dans les cinq à dix ans à venir. Un nouveau silo de six cellules pouvant recevoir au total 10 000 t et un séchoir de 3 000 points sont fonctionnels sur le site de Beaulieu-sous-la-Roche depuis l'été 2012. A cette même époque, a été recruté le quatrième commercial. Il a pour mission de densifier l'activité autour du siège social. Jusqu'alors, le négoce avait recours aux installations de séchage en portuaire et chez les agriculteurs. Il s'appuie également sur les installations de stockage à la ferme d'agriculteurs qui vont stocker aussi pour des voisins. Et il loue en portuaire 35 000 t à La Pallice et Nantes-Montoir.
Avec l'ensemble de ces moyens, le négoce vendéen espère bien atteindre à terme les 450 000 à 500 000 t de collecte, activité qui, ces dernières années, attire plutôt les nouveaux clients.
Hélène Laurandel
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